CRISE SANITAIRE : une loi spéciale pour assurer la prise en charge des personnes atteintes de “CoViD long”

Jan 25, 2022Droit des associations et des ESMS, Droit public, RGPD

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Au JO du 25 janvier 2022 a été publiée la loi n° 2022-53 du 24 janvier 2022 visant à la création d’une plateforme de référencement et de prise en charge des malades chroniques de la covid-19.

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1. Présentation

Cette loi tient en deux articles représentant au total 12 lignes de texte.

L’article 1er énonce que, pour mieux accompagner les personnes touchées par le CoViD-19, une plateforme de suivi est créée, se déclinant sous toutes les formes proposées par les technologies, notamment des sites Internet et des applications. Elle doit permettre à tous les patients qui le souhaitent de se faire référencer comme souffrant ou ayant souffert de symptômes post-covid. Son accès est gratuit. Les modalités de fonctionnement de cette plateforme seront fixées par décret après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).

Quant à l’article 2, il précise qu’après traitement des déclarations enregistrées sur la plateforme, les personnes ayant des symptômes persistants de la covid-19 sont prises en charge soit par leur médecin traitant – dans le cadre d’un protocole déterminé – soit dans une unité de soins post-covid pour les malades atteints de pathologies plus lourdes.

Il ajoute que les agences régionales de santé (ARS) facilitent une mise en œuvre rapide des unités de soins post-covid dans les établissements hospitaliers de proximité, en veillant à leur apporter les moyens humains et financiers permettant de développer un suivi personnalisé à la hauteur de ces symptômes persistants.

Enfin, il dispose que les analyses et les soins remboursés par l’assurance maladie sont couverts intégralement dans la limite des tarifs de responsabilité et, le cas échéant, par un remboursement complémentaire des mutuelles santé.

2. Commentaire

Cette loi attire tout d’abord l’attention par sa grande concision. Voici une méthode logistique qui rond avec les habitudes et qui, dans l’absolu, ne peut être que plébiscitée.

Ceci étant, on ne voit que très rarement de textes législatifs aussi dénués ose substance que celui-ci. En effet, à l’exception de la décision proprement dite de créer la plateforme, quel est l’apport de cette loi ?

  • Constituant un traitement de données à caractère personnel, la plate-forme doit adopter des règles de fonctionnement conforme au règlement général sur la protection des données (RGPD), ce qui justifie l’adoption préalable d’un avis par la CNIL. Mais serait-ce inédit ?
  • Les personnes malades sont soignées par leur médecin traitant et, en cas de pathologies plus lourde, par l’hôpital : quoi de neuf ou d’innovant ?
  • Les soins et examens sont prises en charge financièrement par l’assurance maladie selon le droit commun : où est la spécificité de la loi sur ce point ?
  • Les ARS doivent veiller à ce que la prise en charge des personnes atteintes de CoViD long soit correctement assuré, notamment dans les unités hospitalières post-CoViD. En quoi la mission de veiller à ce que les besoins de soins de la population soient satisfaits serait-elle une nouvelle mission pour ces agences ?

Le texte, pourrait être pertinent, aurait pu comprendre certains éléments substantiels tels que, par exemple :

  • la désignation de la personne responsable du traitement que constitue la plateforme. C’est un minimum lorsqu’on institue un nouveau traitement de données à caractère personnel – d’une telle ampleur et d’une telle sensibilité – comme on a pu le constater à l’occasion de la mise en place des systèmes d’information dédié à la gestion de la crise sanitaire ;
  • la désignation de la personne ou de l’autorité chargée de déterminer le contenu du protocole de soins que les médecins traitants doivent appliquer, comme c’est le cas dans de nombreux autres domaine du soin ;
  • les moyens juridiques et financiers à disposition des ARS, notamment pour faire exception aux règles de planification et de financement, aussi bien en termes d’implantations que de capacité. Cela se justifierait compte tenu de l’ambition affichée de veiller à la présence elle efficacité d’unité post-CoViD dans tous les établissements de santé de proximité ;
  • une modification de la LFSS 2022 – en particulier, de l’objectif général de dépenses (OGD) sanitaire – pour soutenir la généralisation et le renforcement des unités post-CoViD.

En définitive, la question se pose de savoir à quoi sert cette loi qui « enfonce des portes ouvertes » sans mettre en place un véritable dispositif de soins, alors même que les affections du CoViD long sont bien réelles et qu’elles seront sans doute, pour la population, la grande conséquence délétère de la pandémie. A quoi sert-elle, sauf peut-être à faire de la communication politique tout en essayant de faire croire que les problèmes de santé publique se traitent exclusivement à coup d’applications smartphone ?

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