Le 2 septembre 2021, Fabrice GZIL, directeur-adjoint de l’Espace de réflexion éthique d’Île-de-France et de l’Espace national de réflexion éthique sur les maladies neuro-évolutives, a remis à Brigitte BOURGUIGNON, ministre déléguée en charge de l’autonomie, une “charte éthique et accompagnement du grand âge”.
.
Cette charte a été élaborée sur la base des résultats d’un sondage ayant reçu la réponse de 4 333 personnes dont 55 % de professionnels, 26 % d’aidants et 4,38 % de personnes de plus de 75 ans.
Elle affirme sur 10 principes :
1 – Reconnaître chaque personne dans son humanité et sa citoyenneté, dans son inaliénable dignité et dans son identité singulière. Lui témoigner solidarité, considération et sollicitude quels que soient son âge, son état de santé, ses capacités ou son mode de vie ;
2 – Favoriser l’exercice par la personne de l’ensemble de ses potentialités. Se préoccuper de l’effectivité de ses droits. Préserver le plus possible son intégrité, son bien-être, son confort et ses intérêts, tout en réduisant au maximum les restrictions éventuelles à l’exercice de ses libertés ;
3 – Être à l’écoute de ce que la personne sait et de ce qu’elle exprime. L’informer de façon honnête, adaptée et respecter ses décisions. S’assurer de son consentement ou, à défaut, de son assentiment. Tenir compte de son histoire, de sa culture et de ce à quoi elle attache de la valeur ;
4 – Garantir un accès équitable à des soins et à des aides appropriés. Faire en sorte que la personne puisse bénéficier, au moment opportun, d’une évaluation de sa situation et de ses besoins. Évaluer l’impact des interventions sur le bien être global de la personne ;
5 – Protéger le droit pour chaque personne d’avoir une vie sociale, une vie familiale, une vie affective et une vie intime. Respecter son droit à la vie privée, préserver le plus possible son intimité ainsi que la confidentialité des informations et des données qui la concernent ;
6 – Accompagner la personne de manière globale et individualisée, même lorsque des aides ou des soins importants sont nécessaires. Tenir compte de l’ensemble de ses besoins physiques, psychiques et sociaux. Favoriser son autonomie de vie et son inclusion dans la société ;
7 – Faire en sorte que chacun puisse bénéficier, jusqu’au terme de son existence, de la meilleure vie et de la meilleure qualité de vie possible. Permettre aux personnes qui le souhaitent d’indiquer à l’avance leurs préférences et leurs volontés. Prendre soin des mourants et honorer les défunts ;
8 – Respecter dans leur diversité les savoirs, les compétences, les rôles et les droits des familles et des proches. Soutenir les aidants familiaux et les proches aidants. Si la personne accompagnée n’y est pas opposée, s’efforcer de bâtir avec eux des liens de coopération et de confiance mutuelle ;
9 – Prendre soin des professionnels et des bénévoles, les considérer et les soutenir dans leur engagement auprès des personnes. Faire en sorte qu’ils se sentent écoutés et reconnus dans leurs compétences. Les sensibiliser au repérage et à la prévention des maltraitances ;
10 – Prendre des décisions informées, réfléchies et concertées, dans l’intérêt de tous. Encourager la production de savoirs et la remontée des informations. Préserver des espaces pour le questionnement et la réflexion. Renforcer la collégialité des décisions en consultant l’ensemble des personnes concernées.
Cette charte présente bien évidemment un intérêt éthique puisqu’elle constitue un prétexte à l’interrogation individuelle et collective des pratiques professionnelles. Il fait rappeler qu’une telle démarche de questionnement correspond aux recommandations de bonnes pratiques professionnelles élaborées en 2010 par l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ANESM).
Toutefois, il faut souligner qu’elle n’a aucune valeur contraignante, le seul document règlementaire de référence étant la Charte des droits et libertés de la personne accueillie annexée à l’arrêté du 8 septembre 2003. Aucune non conformité à cette charte ne peut donc à ce jour être prise en compte dans :
- une procédure disciplinaire, ordinale ou professionnelle ;
- la décision d’engager le contrôle ou l’inspection d’un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) ou d’une petite unité de vie (PUV) ;
- l’édiction d’une injonction ;
- la désignation d’un administrateur provisoire ;
- le prononcé de sanctions financière ;
- la fermeture administrative d’un établissement ;
- l’évaluation d’un d’un établissement ;
- l’exigence d’une demande de renouvellement d’autorisation ;
- la sanction de l’inexécution d’une convention pluriannuelle tripartite (CPT) ou d’un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM).
Enfin, la mise en ligne de cette charte sur le site Internet du ministère est l’occasion de rappeler qu’aux termes de l’article L. 311-2 du Code de l’action sociale et des familles (CASF) :
“Une charte nationale est établie conjointement par les fédérations et organismes représentatifs des personnes morales publiques et privées gestionnaires d’établissements et de services sociaux et médico-sociaux. Cette charte porte sur les principes éthiques et déontologiques afférents aux modes de fonctionnement et d’intervention, aux pratiques de l’action sociale et médico-sociale et aux garanties de bon fonctionnement statutaire que les adhérents des fédérations et organismes précités sont invités à respecter par un engagement écrit. / Elle est publiée par arrêté du ministre chargé des affaires sociales”.
Force est de constater que, quelques 19 ans après l’entrée en vigueur de cette disposition issue de la loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002, la charte en question n’existe toujours pas …