Plusieurs CREAI ont, sous la plume de leurs conseillers techniques, publié un article commun dans la première livraison de 2021 de la Revue française des affaires sociales (RFAS) dont le titre est : “Le non-recours aux établissements et services médico-sociaux du secteur handicap, témoin d’une inadéquation entre offre et demande”.
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Cet article, téléchargeable sur le site scientifique www.cairn.info, présente un intérêt pour saisir à la fois l’actualité et l’acuité de la question du manque de places disponibles. L’étude a été conduite par la réalisation de 103 entretiens de personnes en situation de handicap disposant d’une orientation vers un établissement ou service social ou médico-social (ESSMS) mais non prises en charge. Il s’agissait le plus souvent de personnes affectées par un handicap moteur ou psychique, titulaires d’une notification d’orientation en foyer, et la majorité d’entre elles avait déjà été prise en charge. La moitié de ces personnes n’avait pas pris contact avec l’ESSMS suggéré par la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH), en partie de manière unilatérale.
D’un point de vue juridique, il faut rappeler que
L’article évoque les solutions alternatives qui ont été mises en oeuvre par les familles, grâce à l’intervention de professionnels libéraux. Il s’interroge également sur les causes de ce non-recours :
- l’inadéquation de l’offre par rapport aux besoins ou souhaits ;
- le refus des candidatures par les EESMS ;
- une stratégie de sécurisation du parcours.
Les personnes interrogées ont exprimé leur désir d’une vie « chez soi » et aimeraient pouvoir bénéficier d’un étayage à domicile, sur un mode différent des services médico-sociaux actuels.
D’un point de vue juridique, il faut rappeler que le droit à une prise en charge a été consacré par le juge administratif : l’Etat a la responsabilité d’apporter des réponses adéquates aux besoins de la population et il s’agit là d’une obligation de résultat. Dans le champ du handicap, certains arrêts concernent des enfants handicapés non scolarisés,[1] d’autres des enfants autistes sans prise en charge.[2] Par ailleurs, le droit à compensation par la mise en œuvre d’un accompagnement a été reconnu comme droit ou liberté fondamentale au sens de l’article L. 521-1 du Code de justice administrative (CJA).[3] Mais l’office du juge ne s’est pas limité au seul champ du handicap : le principe du droit à une prise en charge engage la responsabilité de l’Etat dans le champ social[4] et dans celui de l’accueil des demandeurs d’asile.[5]
[1] CE, 8 avril 2009, Consorts Laruelle, n° 311434 ; CAA Nantes, 29 mars 2012, M. & Mme Christophe X…, n° 11NT00477, obs. O. Poinsot, RGDM n° 43, juin 2012, p. 544.
[2] CE, 16 mai 2011, Mme Annie A… & M. Geoffrey B…, n° 318501 ; TA Paris, 15 juillet 2015, n° 1416868, 1416874, 1416876, 1416880, 1416881, 1416888, 1422391 et 1422407, obs. O. Poinsot, RGDM n° 58, mars 2016, p. 481 ; CAA Marseille, 11 juin 2012, Mme Annie A…, n° 11MA02042, obs. O. Poinsot, RGDM n° 44, septembre 2012, p. 517.
[3] CE, Réf., 28 décembre 2020, Mme C… B… c/ Ministre de la santé et des solidarité & ARS d’Ile-de-France et des Hauts-de-France, n° 447411.
[4] En cas d’insuffisance de places de logement d’urgence : CAA Lyon, 6ème Ch., 30 septembre 2021, Président du Conseil départemental du Puy-de-Dôme c/ Préfet du Puy-de-Dôme, n° 19LY02979.
[5] En cas d’insuffisance de places en centre d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) : CE, 6ème Ch., 8 juillet 2020, Mme A… c/ Préfecture de la Loire-Atlantique, n° 425310.