L’arrêt du travail visant à contester le licenciement d’un salarié ne constitue pas un exercice normal du droit de grève

Juin 23, 2022Droit social

}

Temps de lecture : <1 minutes

Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié, ni faire l’objet d’une mesure discriminatoire en raison de l’exercice normal du droit de grève (article L 1132-2 du Code du travail). A défaut, les mesures prises par l’employeur sont nulles.

Un arrêt de travail ne constitue une grève que si les conditions suivantes sont remplies :

  • La cessation du travail (Cass. soc., 22 avril 1964, n° 61-40.673) ;
  • La concertation des salariés (Cass. soc., 13 nov. 1996, n° 93-42.247) ;
  • Des revendications professionnelles dont l’employeur a connaissance au moment de l’arrêt de travail (Cass. soc., 17 déc. 2003, n° 01-46.251).

Seule la défense d’un intérêt collectif et professionnel doit être poursuivie par les salariés grévistes (Cass. soc., 2 juillet 2014, no 13-12.562).

Dans un arrêt récemment publié, la Cour de cassation tranche la question de savoir si des salariés ayant cessé de travailler en soutien d’un collègue pouvaient être considérés comme « grévistes ».

Dans cette affaire, plusieurs salariés d’une entreprise de prestation de services ont adressé un courrier à leur employeur pour l’informer qu’ils cessaient le travail, en contestation du licenciement d’un collègue dont ils sollicitaient la réintégration.

La cessation collective concertée du travail s’est déroulée du 27 octobre 2014 au 31 octobre 2014 inclus.

Après avoir été mis en demeure de reprendre le travail, 3 salariés ont été convoqués le 31 octobre 2014 à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour faute grave, avec mise à pied à titre conservatoire.

Le 20 novembre 2014, ces salariés ont été licenciés pour faute grave du fait de leur absence injustifiée pendant tout ou partie de la période en cause.

Devant le Conseil de prud’hommes, les salariés ont sollicité l’annulation de leur licenciement et leur réintégration.

La Cour de cassation a validé la décision des juges du fond en ce qu’elle a considéré que la cessation du travail n’était pas fondée sur une revendication professionnelle et que, dès lors, l’arrêt de travail ne constituait pas l’exercice du droit de grève.

L’employeur était donc fondé à licencier les salariés pour absence injustifiée.

En effet, la lettre transmise à l’employeur le 27 octobre 2014, qui doit seule être prise en considération pour apprécier les revendications préalablement portées à la connaissance de l’employeur, avait pour seul objet la contestation de la décision de licenciement d’un salarié que les salariés estimaient abusive et déloyale.

Dans cette lettre, les salariés se contentent de contester point par point les fautes imputées à ce salarié et la décision de l’employeur de le licencier, et que le licenciement a été prononcé pour des faits strictement personnels.

A notre sens, la Cour de cassation aurait pu admettre la légitimité de cette « grève » si les salariés avaient motivé leur arrêt de travail par une menace de licenciement pesant sur plusieurs salariés et non sur un salarié pris individuellement.

Cet arrêt de la Cour de cassation nous apparait primordial pour l’employeur en ce qu’il encadre les possibilités pour les salariés de contester l’exercice du pouvoir disciplinaire.

Cass. soc. 6 avril 2022, n° 20-21586

Ces articles pourraient vous intéresser