AU JO du 13 mai 2021 a été publiée l’ordonnance n° 2021-584 du 12 mai 2021 relative aux communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) et aux maisons de santé.
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Cette ordonnance intervient pour favoriser le développement de l’exercice coordonné des professionnels de santé de ville. De manière générale, elle assouplit l’encadrement de cet exercice tant du point de vue juridique que fiscal :
- en instituant des règles fiscales particulières pour les CPTS, afin de sécuriser la pratique du versement d’indemnités et de rémunérations au profit de leurs membres, pour les missions de service public qu’ils mettent en œuvre ;
- en permettant aux maisons de santé constituées sous la forme de société interprofessionnelle de soins ambulatoires (SISA) de salarier elles-mêmes les assistants médicaux et autres professionnels de santé, ainsi que de percevoir des rémunérations forfaitaires et à les redistribuer à leurs associés ou aux professionnels intervenant en vue de la mise en œuvre de leur projet de santé.
I. – Présentation générale du dispositif
Le détail de ces modifications de statut et de régime des CPTS et des maisons de santé est le suivant :
1.1. Les CPTS
1.1.1. Statut
Avant le 13 mai 2022 à minuit, les CPTS devront s’être constituées sous forme d’association déclarée (nouvel article L. 1434-12-1 du Code de la santé publique et article 5 de l’ordonnance).
1.1.2. Missions de service public, conventionnement et financement
Les missions de service public assurées par les CPTS sont (nouvel article L. 1434-12-2, I du CSP) :
- l’amélioration de l’accès aux soins,
- l’organisation des parcours de soins associant plusieurs professionnels de santé,
- le développement des actions territoriales de prévention,
- le développement de la qualité et de la pertinence des soins,
- l’accompagnement des professionnels de santé sur leur territoire,
- la participation à la réponse aux crises sanitaires.
Le financement de ces missions prend la forme d’aides spécifiques de l’Etat ou de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) pour compenser les charges correspondantes, dans le cadre d’une convention conclue par la CPTS avec l’agence régionale de santé (ARS) et la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) (nouvel article L. 1434-12-2, II).
Le contenu et la durée de cette convention seront définis par décret en Conseil d’Etat, tout comme les modalités de compensation.
1.1.3. Régime fiscal
Les CPTS peuvent désormais opérer des versements d’indemnités et de rémunérations au profit de leurs membres, notamment afin de compenser la perte de ressources entraînées pour les membres par les fonctions qu’ils exercent au sein de la communauté ou par leur participation à la mise en œuvre de ses missions. Les conditions et le plafond annuel de ces indemnités seront fixées par décret, en même temps que les modalités de fonctionnement des CTPS (nouvel article L. 1434-12-1 du CSP).
Par ailleurs, les CPTS dont le projet de santé est réputé validé par le directeur général de l’ARS bénéficient :
- d’une exonération d’impôt sur les sociétés (IS) à raison de leurs missions de service public (article 4, 1° de l’ordonnance complétant l’article 207, 1 du Code général des impôts par un 17°) ;
- d’une exonération de cotisation foncière des entreprises (CFE) (nouvel article 1461 A du Code général des impôts).
1.2. Les maisons de santé
Pour les maisons de santé constituées en SISA , le recrutement des professionnels est facilité, qu’il s’agisse de professionnels de santé ou bien d’autres professionnels concourant à la mise en œuvre du projet de santé (article L. 4041-2 du CSP complété). En effet, l’emploi des professionnels de santé est particulièrement utile pour répondre aux besoins des zones connaissant des difficultés de démographie médicale, le salariat étant très prisé notamment des jeunes générations et des retraités souhaitant poursuivre leur exercice. Quant à l’emploi des autres professionnels, il favorise une prise en charge globale particulièrement adaptée aux populations en situation de précarité.
1.2.1. Ouverture au salariat
Pour permettre l’ouverture des SISA au salariat tout en préservant leur modèle d’exercice, ces dernières peuvent – si elles l’inscrivent dans leurs statuts – exercer une activité de soins ou toute autre activité contribuant à la mise en œuvre du projet de santé de la maison de santé au travers de ses salariés, ce qui justifie qu’elle s’inscrive auprès des Ordres dont les professionnels salariés dépendent (article L. 4041-3 du CSP complété), tout en permettant aux professionnels libéraux de continuer à exercer pour leur propre compte.
De plus, les médecins salariés peuvent être choisis comme médecins traitants et les tarifs applicables aux actes des professionnels de santé salariés sont les tarifs conventionnels appliqués aux professionnels libéraux (article L. 162-14-1, II, in fine du Code de la sécurité sociale).
Toutefois, le nombre de professionnels de santé salariés exerçant des activités de soin doit toujours être inférieur à celui des professionnels libéraux associés (article L. 4041-4 du CSP complété).
1.2.2. Recours ponctuel à des libéraux
Afin de faciliter la pluriprofessionnalité et les prises en charge globales sans faire appel au salariat mais en recourant à des interventions ponctuelles – tant auprès des professionnels de santé en interne/externe que d’autres professionnels en externe – les SISA peuvent désormais percevoir des subventions forfaitaires, à charge pour elle d’en assurer la redistribution à chaque intervenant concerné. Le partage d’honoraires est donc possible.
Par ailleurs, pour favoriser la pérennisation des maisons de santé dans les zones sous-denses, lorsque le nombre ou la qualité des associés – au minimum deux médecins et un auxiliaire médical – n’est pas satisfait, le délai permettant à un juge de prononcer la dissolution de la SISA est étendu. Initialement fixé à six mois, il peut être porté jusqu’à dix-huit mois dans le cas où, dans l’intervalle, un salarié a pu être recruté en remplacement du professionnel manquant.
1.2.3. Emploi d’assistants médicaux en groupement d’employeur
Les assistants médicaux constituent un appui décisif aux médecins généralistes en leur libérant du temps médical.
Pour tirer parti de cette possibilité, les SISA peuvent désormais développer des activités de groupement d’employeurs (GE) au bénéfice de tout ou partie de leurs associés, en mettant des assistants médicaux au service de médecins généralistes (article L. 1253-3 du Code du travail complété). Ces derniers définiront seuls des missions des assistants médicaux, sans pour autant que cela représente une charge ou une responsabilité pour les autres associés.
II. – Commentaire
Dans la logique de parcours qui irrigue actuellement le système de santé dont font partie les établissements et services sociaux et médico-sociaux, il est utile que les directeurs/trices aient connaissance de ces nouvelles modalités d’adaptation des activités des CPTS et des SISA.
En effet, ces opérateurs sont impliqués dans l’organisation et le fonctionnement des dispositifs d’appui à la coordination des parcours de santé complexes (DAC) dont les ESSMS sont appelés à devenir partenaires (voir le post du 22 mars 2021).
De plus, alors que la facilitation de l’accès aux soins des personnes vulnérables – et notamment des personnes en situation de handicap – constitue une priorité de l’évolution du système de santé (voir à ce sujet : le rapport de 2019 du docteur Philippe DENORMANDIE commandé par le secrétariat d’Etat aux personnes handicapées ; le dossier bibliographique du centre de documentation de l’IRDES de novembre 2020), les ESSMS auront intérêt à connaître les possibilités concrètes d’action des CPTS et maisons de santé.