Le 3 février 2022, le Tribunal judiciaire (TJ) de Narbonne a rendu un jugement très lourd de conséquences pour le secteur social et médico-social. En effet, il considère que l’organisme gestionnaire est responsable contractuellement à l’égard de l’usager et de ses parents, sur ses fonds propres, d’une insuffisance de scolarisation quand bien même le nombre d’instituteurs affectés par l’Education nationale à son unité d’enseignement (UE) est insuffisant.
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1. Les faits
Un enfant atteint de troubles du spectre autistique (TSA) est admis dans un institut médico-éducatif (IME) à l’âge de 8 ans. Sa scolarisation est assurée à mi-temps (4 demi-journées par semaine), dans l’unité d’enseignement externalisée (UEE) que gère l’établissement dans l’enceinte d’un collège. La notification d’orientation en vigueur prévoit, sans autre précision, une orientation en IME et en pôle de compétences et de prestations externalisées (PCPE) autisme.
Parce que le nombre de places d’élèves handicapés au sein de cette UEE, faute de personnel enseignant suffisant, oblige l’IME à prioriser la scolarisation des enfants de moins de 16 ans en vertu de l’obligation scolaire, à partir de son 16ème anniversaire l’usager ne bénéficie plus que de 2 demi-journées de scolarisation. L’établissement adresse aux parents un avenant de personnalisation du contrat de séjour qui tient compte de cette diminution.
Les parents, tous deux enseignants, prennent un avocat qui notifie à l’IME leur refus de signer l’avenant. L’établissement répond qu’il ne peut faire au mieux faute de moyens suffisants ; il reçoit alors une mise en demeure de se conformer au projet personnalisé de scolarisation (PPS) adopté par la Commission des droits de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) et qui prévoit une scolarisation à mi-temps.
Sollicitée par les parents, la direction académique des services de l’Education nationale (DASEN) leur indique par écrit que la scolarisation de leur enfant doit obligatoirement être assuré conformément aux prévisions du PPS.
Les parents décident alors de contester judiciairement la position de l’IME.
2. La procédure
Les parents assignent l’organisme gestionnaire devant le Tribunal judiciaire. Ils sollicitent le prononcé d’une injonction sous astreinte, afin de contraindre l’IME à rétablir la scolarisation de leur enfant à mi-temps. Par ailleurs, ils demandent que leur soient alloués des dommages-intérêts visant à indemniser leur préjudice moral et celui de leur fils du fait de la diminution du temps de scolarité.
Pour ce faire, ils se prévalent les arguments suivants :
- la scolarisation de leur enfant vise à assurer son inclusion dans la vie ordinaire, le PPS ayant alors pour objectif de lui permettre de bénéficier d’une véritable progression, dans une approche non discriminatoire, et d’éviter « l’institutionnalisation du handicap” ;
- l’objectif de scolarisation poursuivi et l’absence de discrimination correspond aux standards internationaux de l’Organisation des Nations-Unies et du Conseil de l’Europe, standards dont divers avis et recommandations de la Commission nationale consultative des personnes handicapées (CNCPH) et du Défenseur des droits ont souligné l’importance ;
- l’article L. 114-1 du Code de l’éducation, issu de l’article 15 de la loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance, a étendu l’obligation scolaire jusqu’à l’âge de 18 ans ;
- l’obligation scolaire ainsi définie est une obligation de résultat à la charge, non seulement de l’État mais aussi des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS) pour enfants et adolescents ;
- l’obligation de ces établissements et de mettre en œuvre le parcours personnalisé des enfants en situation de handicap, étant précisé que les prescriptions de la CDAPH – et notamment le PPS – leur sont opposables au-delà même du contenu explicite de la notification d’orientation ;
- le choix de réduire le temps de scolarisation de leurs enfants est exclusivement imputables à l’IME qui ne rapporte pas la preuve même du respect d’une simple obligation de moyens ;
- la discrimination est avérée dès lors qu’il n’est pas prouvé que cette restriction ait été adaptée au cas particulier de leur enfant et que chacun de ses besoins ait été effectivement pris en compte.
L’organisme gestionnaire, de la mouvance parentale, manifeste d’abord son souhait de favoriser la meilleure scolarisation possible des enfants en situation de handicap. Ceci étant, il soutient pour sa défense que :
- l’obligation scolaire, en vertu de l’article L. 131-1 du Code de l’éducation, ne concerne que les enfants âgés de 3 à 16 ans ;
- un arrêt de la Cour administrative d’appel (CAA) de Marseille a dit our droit pour droit qu’il faut distinguer la scolarisation au nom de obligation scolaire, c’est-à-dire jusqu’à 16 ans, de la formation jusqu’à l’âge de 18 ans prévu par l’article L. 114–1 du Code de l’éducation. La loi m’impose pas qu’une telle formation soit assurée en établissement scolaire ;
- le rectorat a fait savoir à l’organisme gestionnaire qui convenait d’accorder la priorité à la scolarisation des enfants de 3 à 16 ans ;
- aucune discrimination n’a été commise ni aucune faute dans l’approche spécifique du cas de cet enfant pour l’orienter en fonction de ses besoins ;
- l’établissement n’est pas lié par le contenu du PPS mais seulement par les termes de la notification d’orientation intervenue en application de l’article L. 241–6 du Code de l’action sociale et des familles (CASF). En l’espèce la CDAPH ne s’est pas prononcée sur les modalités précises de scolarisation mais s’est limitée à prononcer une orientation en IME et AMP et PCPE autisme. Par ailleurs, le PPS a simplement identifié la scolarisation en UEE comme un objectif pédagogique ;
- l’obligation de l’organisme gestionnaire est une obligation de moyens qui est limité par les ressources qui sont mises à sa disposition ainsi que par le la limitation du nombre de places au sein de l’UEE. En l’espèce, compte tenu de ces limitations, il n’était matériellement possible de scolariser que 9 usagers à la fois, à tour de rôle. S’étant plaint auprès de l’Education nationale du nombre insuffisant d’enseignants, l’organisme gestionnaire a obtenu l’allocation d’un demi poste d’instituteur destiné aux enfants atteints de polyhandicap et non aux jeunes depuis de 16 ans ;
- s’étant efforcé de maintenir 2 demi-journées de scolarité hebdomadaire en dépit des contraintes, l’organisme gestionnaire est allé au-delà de ses obligations et on ne saurait lui adresser de reproches ;
- l’État étant seul responsable de la scolarisation des enfants en situation de handicap, les parents auraient dû l’attraire en justice.
3. La solution
Le TJ développe pas moins de 7 pages de motivation détaillée pour trancher le litige.
3.1. L’inclusion scolaire et sociale de l’enfant ne peut être limitée par une question de moyens
Il relève d’abord que le droit au développement éducatif constitue “un principe fondamental et d’un intérêt supérieur pour tout enfant et tout jeune mineur” qui se traduit par le droit à une scolarisation et à une formation, sans discrimination, dont l’État est débiteur. Mais l’obligation qui en découle pèse également sur les organismes chargés de mettre ces droits en œuvre. Il s’agit là d’une obligation de résultat, particulièrement évidente à l’égard des enfants et adolescents en situation de handicap : dans leur situation, cette obligation est renforcée.
Il considère que les limitations apportées par la législation, s’agissant de l’âge limite de l’obligation scolaire, pourraient être critiquées. En effet, le processus d’acquisition des connaissances et des apprentissages est naturellement plus long et complexe pour des élèves en situation de handicap, leurs difficultés pouvant se traduire par un retard de plusieurs années par rapport à des enfants non handicapés. Le droit scolarisation de l’enfant handicapé ne devrait donc pas être limité par un seuil d’âge mais procédé d’une adaptation sur-mesure de son parcours scolaire, faute de quoi il serait vain de prétendre lui garantir une scolarité complète ou suffisamment avancée.
Il indique ensuite, au visa de l’article L. 114-1 du Code de l’éducation, qu’il y a lieu de distinguer l’obligation scolaire jusqu’à 16 ans de la formation qui doit ensuite être assurée jusqu’à 18 ans.
Il prend en compte l’article L. 246-1 du CASF, propre à la situation des personnes atteintes de TSA ou de polyhandicap, qui institue à leur profit l’obligation d’assurer une prise en charge pluridisciplinaire tenant compte des besoins et difficultés spécifiques et qui soit adaptée à l’état et à l’âge de la personne, y compris en matière éducative et pédagogique.
Conjuguant ces textes, il juge que les autistes mineurs doivent bénéficier d’un parcours personnalisé qui répond à leurs besoins et difficultés spécifiques, qui part de la scolarisation et se poursuit nécessairement vers une insertion sociale au sens large, pour permettre une autonomie de vie sociale.
Il écarte l’application de la solution dégagée par la CAA de Marseille car son arrêt est antérieur à la loi du 26 juillet 2019 dont procède l’article L. 114–1 du Code de l’éducation dans sa rédaction applicable au litige.
Il relève que la diminution du temps scolaire contestée résulte d’un manque de moyens et de choix internes qui contrarient l’ensemble de la politique publique d’inclusion sociale des jeunes autistes. S’il admet que l’organisme gestionnaire devait faire face à ” un dilemme difficile” et “essayer d’y donner des réponses imparfaites”, il considère que « cette impuissance administrative ne constitue pas une réponse aux obligations juridiques lui incombant ».
3.2. L’obligation de scolariser l’enfant résulte des engagements pris dans le contrat de séjour en application de la notification d’orientation de la CDAPH et du PPS
Le TJ estime que « le contrat de séjour est de façon indissociable adossé au projet individualisé d’accompagnement » ; ce projet a donc une valeur obligatoire. En l’espèce, le contrat de séjour qui a été conclu retiens, entre autres objectifs, l’enseignement et le soutien pour l’acquisition des connaissances ; l’avenant qui a été proposé à la famille fait explicitement référence au maintien des acquis scolaires. Le tribunal considère dès lors que la scolarisation devait contractuellement se poursuivre au-delà de 16 ans.
Par ailleurs, il considère que le projet individualisé se décline, indépendamment des termes de la notification d’orientation de la CDAPH, sous la forme du PPS, document d’utilité pratique. Or, en l’espèce, il constate que :
- dans le PPS en vigueur, la scolarisation à mi-temps de l’enfant constitue une priorité et un objectif pédagogique ;
- cette mention reprend les termes du dernier bilan de scolarisation GEVA-Sco ;
- le rapport établi par l’équipe pluridisciplinaire au titre de la revue du projet individualisé ne donne aucune justification à la proposition de réduire le temps de scolarisation ;
- cette proposition unilatérale n’a pas été entérinée par une nouvelle décision de la CDAPH puisqu’il n’y a pas eu de modification du PPS.
L’IME n’était donc pas fondé à s’affranchir du PPS ayant nécessairement conditionné la notification d’orientation de la CDAPH par le jeu de l’article D. 351-7 du Code de l’éducation ; en modifiant unilatéralement les conditions de scolarisation prévues, il a commis une faute.
3.3. La restriction apportée à la scolarisation de l’enfant constitue une discrimination
La restriction apportée en l’espèce constitue, pour le TJ, “une atteinte grave à l’effectivité du soutien que la collectivité doit aux personnes défavorisées suivant le principe de solidarité”. Elle constitue une discrimination en raison de l’âge et du handicap.
3.4. L’organisme gestionnaire ne peut se justifier par un manque de moyens
Le juge considère que
« l’organisation ‘LOLFique’ des financements publics correspond à ce souci de doter les missions par l’évaluation précise et préalable des besoins, ce qui se traduit par exemple par la définition de profil de poste justifiant la création ou pas d’équivalent temps plein ».
De ce point de vue, l’insuffisance de moyens dont l’organisme gestionnaire fait état ne traduit rien d’autre que son « manque de prévisibilité gestionnaire ». Sur ce point, le juge remarque qu’aucun élément budgétaire n’a été produit par l’IME pour démontrer qu’il a bien présenté à l’autorité de tarification les demandes de moyens supplémentaires nécessaires.
3.5. Les fautes commises par l’organisme gestionnaire ouvre droit à réparation
Le juge admet que l’insuffisance de scolarisation a causé un préjudice moral à l’enfant, en limitant non seulement l’acquisition de ses apprentissages mais aussi en l’exposant à une régression contraire à son intérêt.
Il relève par ailleurs que les parents ont subi un préjudice direct et personnel du fait du non respect du contrat de séjour, des tracasseries qu’ils ont indûment subies et des difficultés éducatives qui en sont résultées à l’égard de leur fils.
Au vu de l’ensemble de ces éléments, le TJ :
- enjoint l’organisme gestionnaire à rétablir à mi-temps la scolarisation de l’enfant sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
- le condamne également à verser des dommages et intérêts :
- de 4000 € au profit de l’enfant, en réparation du préjudice moral ;
- de 3000 € au profit des parents, en réparation de leur préjudice personnel ;
- et le condamne enfin à verser 2 200 euros aux parents au titre des frais irrépétibles.
4. L’intérêt du jugement
La solution adoptée par ce jugement, inédite, appelle nécessairement des commentaires, tant elle est de nature à fragiliser la position d’ESSMS pour enfants et adolescents confronté – tout comme les parents d’élèves handicapés – à de manifestes insuffisances de moyens qui sont en réalité imputables à l’État. Mais il faut également commenter ce qui apparaît comme une approche nouvelle de ce que peuvent être les obligations d’un contrat de séjour.
4.1. L’insuffisance des moyens est une réalité qui ne peut être ignorée
Les professionnels des ESSMS-PH pour enfants et adolescents, tout comme les enseignants de l’Education nationale, sont confrontés de longue date à une insuffisance chronique des moyens humain que l’État a la charge de mobiliser au profit des élèves handicapés. Si l’opinion publique a récemment été sensibilisée à la situation des accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) dans les établissements scolaires de référence, sans doute n’est-elle pas informée que ce qu’on appelle à présent « Le virage inclusif » s’accompagne, depuis de nombreuses années, d’une diminution forte des effectifs d’enseignants spécialisés dans les établissements médico-sociaux. Cette diminution repose :
- en affichage, sur une idéologie du tout inclusif qui fait fi des besoins réels d’enfants et adolescents en situation de handicap dont l’état interdit, de fait, toute scolarisation dans l’établissement scolaire de référence ;
- en réalité, sur la volonté des pouvoirs publics de réaliser des économies puisqu’une prise en charge ambulatoire coûte moins cher qu’une place en établissement.
Concrètement, l’Education nationale met de moins en moins d’enseignants à la disposition des ESSMS pour œuvrer dans les unités d’enseignement (UE), sortes d’écoles spécialisées intégrées aux établissements.
Sur ce plan, il est saisissant de constater le décalage qui peut exister entre la réalité et la vision que peut en avoir le juge judiciaire, même si l’on peut comprendre que ce dernier tient à tout prix à garantir l’effectivité de la scolarisation des enfants en situation de handicap. C’est manifestement le sens de ce jugement qui considère que, quels que soient les moyens à leur disposition, les organismes gestionnaires sont, en fin de parcours, seuls responsables des insuffisances constatées. Sinon résonne de manière générale et abstraite au niveau de l’organisation du système social et médico-social, alors on peut tout à fait concevoir la légitimité d’un tel point de vue : l’objectif poursuivi est de tenir in fine un responsable à qui reprocher l’absence d’effectivité d’un droit subjectif.
Mais voilà : il se trouve que les organismes gestionnaires ne sont pas responsables du manque de moyens qu’ils subissent. Sur ce plan, lorsque le juge vante ce qu’il appelle la “conception ‘LOLFique'” du processus d’attribution des financements publics, il semble manifestement peu au fait des procédures de tarification des établissements. Son raisonnement aurait été justifié si l’on était encore à l’époque d’une tarification réglementaire dans laquelle le critère était celui de l’insuffisance des ressources au regard de l’exercice normal de la mission. Mais – les professionnels ne le savent que trop – les évolutions de la jurisprudence des juridictions de la tarification – qui tendent à renforcer l’effet des mécanismes de limitation des enveloppes et de convergence budgétaire – se conjuguent à l’entrée en vigueur progressive des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM) obligatoires qui substituent le financement à la ressource au mécanisme traditionnel du financement au besoin. On pourrait, non sans quelque ironie, supputer que le Tribunal a épousé sans le savoir la logique du futur modèle de tarification préparé par SERAFIN-PH (à condition bien sûr que les futurs tarifs de prestations correspondent effectivement à la réalité des besoins, ce qui n’est pas encore garanti). Plus sérieusement, on pourrait s’étonner que l’idée d’une responsabilité financière illimitée des organismes gestionnaires n’est pas été davantage combattue :
- il aurait été utile de réorienter le litige vers une recherche de responsabilité de l’État, en prenant des initiatives contentieuse adéquates devant les juridictions administratives. Le jugement, d’ailleurs, a expressément identifié cette possibilité, anticipant les conflits de compétence entre ordres de juridiction qui ne peuvent manquer d’apparaître ;
- il semble que des éléments de faits importants n’est pas été produits aux débats :
- la convention constitutive de l’UE, qui détermine les engagements respectifs de l’organisme gestionnaire et du DASEN notamment en matière de personnel ;
- les pièces budgétaires qui auraient pu permettre de démontrer que l’organisme gestionnaire a identifier les insuffisances et on a demandé la correction.
Il aurait aussi été possible de faire valoir la jurisprudence de certaines Cours d’appel qui ont expressément admis que les obligations des ESSMS-PH sont nécessairement circonscrites par la limite des moyens dont ils disposent.
Quoi qu’il en soit, le Tribunal a envoyé aux organismes gestionnaires le message suivant : “vous êtes responsables sur vos fonds propres des insuffisances du dispositif de scolarisation des usagers et il vous appartient d’en demander réparation à l’État devant le juge administratif.”
Les organismes gestionnaires ont-ils les moyens d’être le banquier de l’État ? Rien n’est moins sûr.
4.2. Le périmètre des obligations du contrat de séjour d’étend
Sur ce point, le tribunal a recouru à un syllogisme inductif :
- contrat de séjour et avenant de personnalisation ont pour objet de mettre en œuvre le plan personnalisé de compensation (PPC) ;
- or le PPC inclut les mesures afférentes à la scolarité qui sont contenues dans le PPS ;
- donc le contrat de séjour met à la charge des professionnels l’obligation de mettre en œuvre le PPS.
Et ce raisonnement est « verrouillé » par l’idée que toute notification d’orientation CDAPH engage, même implicitement, l’établissement à mettre en œuvre le PPS au-delà même des prévisions de cette notification. C’est ainsi que le contenu du PPS acquiert une valeur contractuelle.
Cette valeur, dans l’esprit du juge, est renforcée par le fait que le projet individualisé – qui est un document technique de l’équipe que disciplinaire et non pas un document juridique – définit lui-même le contenu des engagements pris par l’établissement en terme de prestations. Autrement dit, ce jugement revient à admettre que toute modalité concrète d’intervention définie dans le projet individualisé pourrait, en cas d’absence ou d’insuffisance de mise en œuvre, donner lieu à une condamnation de l’organisme gestionnaire sur le fondement de la responsabilité contractuelle.
Parce qu’il est inéquitable de sanctionner un organisme gestionnaire au motif que l’Education nationale ne lui a pas affecté suffisamment d’enseignants, parce qu’également une conception extensive des obligations contractuelles issues du contrat de séjour – nourrie des obligations implicites d’un PPC à l’élaboration duquel les ESSMS ne prennent pas part – générerait une grande insécurité juridique, il faut espérer que ce jugement sera frappé d’appel. Au-delà du cas particulier, c’est tout le secteur social et médico-social qui y a intérêt. A défaut, il ne serait pas surprenant que des ESSMS piégés s’engagent dans une contestation du des orientations CDAPH jugées inapplicables faute de moyens, ce que l’article L. 241-9 du CASF leur permettrait tout à fait de faire.
TJ Narbonne, 3 février 2022, Imbert & Boize c/ AFDAIM-ADAPEI 11, n° RG 21/01726
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